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Médico-social : un MARS et ça repart ?

Nous avons fêté ce vendredi 20 novembre 2020, le 200ème Message d’Alerte Rapide Sanitaire de l’année dont le ton, martial, pose la détermination implacable du gouvernement à contrôler la pandémie. Cette tonalité tranche quelque peu avec des MARS précédents qui laissaient plus de latitude aux directeurs dont on savait bien rappeler le poids des responsabilités. Nous passons des recommandations aux consignes et cela en change forcément la nature.

Cet énième MARS appelle cette fois-ci à des remarques sur la forme et sur le fond sans préjudice du devoir de réserve des directeurs.

Sur la forme, recevoir des consignes ministérielles un vendredi soir est toujours délicieux parce qu’alors que les lumières  de l’avenue de Ségur s’éteignent, la lumière des établissements de santé et médico-sociaux reste. Nos établissements assurent non seulement la continuité du service public mais aussi sa permanence. Plus qu’une question d’orgueil, il en va de l’honneur de l’institution. Il convient simplement de noter à ce stade que de manière habituelle le ministère décide sans concertation et arbitrairement ce qui doit être fait. C’est bien la limite du discours performatif. Penser qu’il suffit de dire pour qu’il soit fait. Il ne faudrait pas oublier qu’en local les idées peuvent être justes et pertinentes.

Sur le fond, le contenu de cette nouvelle directive étonne par l’obligation d’organiser des tests de dépistage massifs dans les établissements, surtout après la mise en place des visites sur rendez vous qui chaque jour entraîne une consommation de ressources au moment où elles sont déjà bien sollicitées par ailleurs.

Choisir de ne pas mettre en place ces mesures quand bien même elles seraient inadaptées au contexte local et la direction pourra subir les foudres des proches des patients et des personnes accueillies. Les mettre en place telles que décrites, c’est ajouter une charge de travail conséquente aux personnels déjà fragilisés, las et fatigués.

Rappelons que les prélèvements nasopharyngés sont des gestes techniques invasifs qui nécessitent du temps et de la compétence qui ne sont pas affectés au service des publics accueillis. C’est à nouveau créer les conditions de la défiance entre directions et personnels. Ces consignes sont d’autant plus absurdes qu’elles ne résistent pas à la réalité quotidienne : le fonctionnement normal d’un établissement est le fonctionnement dégradé. Dès lors, chaque personnel est essentiel et irremplaçable et de toute façon non remplacé car les candidatures n’existent pas.

L’habitude du manque de concertation, nous la goûtons sur les questions statutaires, nous l’avalons tous les jours en gérant les pénuries, nous la digérons face à la colère des personnels, des patients, des résidents et des familles. L’ensemble des agents assume ses responsabilités, dans le cadre des missions confiées, parce que le sens porté est plus grand que la somme de ses parties.

Ne nous y trompons pas : les urgences sont là. La crise sanitaire, certes, mais les réformes pour assurer des financements pérennes : loi sur l’autonomie, réforme de la T2A en MCO, réforme du financement des SSR avec un nouveau report en 2022, sont autant de priorités reportées. Le Ségur de la Santé a ouvert des chantiers. Ils sont loin d’être clos . De nombreux établissements demeurent dans des difficultés substantielles avec des trésorerie incertaines qui fragilisent la mise en œuvre des mesures annoncées depuis le printemps.  Les revalorisations, certes indispensables, pèsent dans une période de forte baisse des recettes liées à l’activité de nos établissements.

Nous comprenons le besoin du gouvernement de mener ce qui n’est en définitive qu’une opération de communication. Alors que l’hiver approche et dans l’espoir de jours meilleurs, William Shakespeare, dans Le songe d’une nuit d’été nous rappelle qu’ « Il ne suffit pas de parler, il faut parler juste ».

Jérôme GOEMINNE (Président), Stéphane GUILLEVIN (Vice-Président catégorie D3S) et Marie-Cécile DARMOIS (Secrétaire nationale D3S)