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L’enquête sur les conditions d’exercice des D3S face aux situations de violences et aux menaces : le risque de la rupture

Les élus et la délégation nationale du SMPS ont lancé au printemps 2024 une enquête portant sur les conditions d’exercice des Directeurs d’établissement sanitaire, social et médico-social (D3S) et notamment leur rapport aux situations de violences et de menaces, indépendamment de son origine (patient ou résident, agent, famille…). Les premiers résultats de cette enquête ont été diffusés à SantExpo les 21, 22 et 33 mai avant d’être présentés de manière consolidée en plénière lors du Congrès national du 19 septembre dernier.  

Cette enquête a été motivée par des signalements récurrents de D3S faisant l’objet de menaces de mort dans le cadre de leur exercice professionnel. Soucieux de quantifier et de qualifier le phénomène, le SMPS a choisi de lancer une enquête annuelle sur la thématique des violences et menaces, à défaut notamment de données sur le sujet. 

Les caractéristiques du métier de D3S en font souvent les seuls interlocuteurs “manageurs” et “décideurs” dans leur structure, souvent de taille moyenne. Ils sont très exposés et sont ainsi amenés à gérer directement des situations difficiles. Ils ont également des échanges plus fréquents avec les usagers, leur famille et leurs représentants que d’autres catégories de manageurs de santé.   

Une enquête qui a su trouver son public et qui se révèle très représentative des statistiques du corps des D3S : 

  • 177 D3S répondants (soit de plus de 10% du corps)
  • 64% de femmes de femmes répondantes (68% des D3S sont des femmes)
  • Une majorité de répondants dans la tranche d’âge moyenne de l’ensemble des D3S (entre 40 et 60 ans). 
  • Une mobilisation massive des D3S en responsabilité dans les EHPAD autonomes (72 répondants) mais également des répondants dans le champ sanitaire, du handicap ou encore de la protection de l’enfance
  • 45% des répondants exercent dans des établissements de 80 à 200 lits
  • 56% exercent seuls dans leur établissement, sans autre collègue directeur 

Près de 60% des répondants reconnaissent se sentir isolés sur leur poste:

La question ouverte a permis de montrer que l’isolement était ressenti de façon protéiforme. La majorité évoque un évoque un isolement managérial ou fonctionnel. Celui-ci se traduit par des décisions prises seul, les contacts rares avec les autres D3S sur le territoire, l’impression d’être le « responsable de tout ». 

Une part non négligeable des D3S ont déjà fait l’objet de propos déplacés dans un cadre professionnel 

69% des répondants ont fait l’objet de propos particulièrement négatifs et offensants dans le cadre de leur exercice professionnel, 54% ont fait l’objet de menaces, y compris sans passage à l’acte, dans le cadre de leurs missions. 


Les situations de violences et de menaces : le quotidien bien « anormal » des D3S 

Si on cumule les réponses « oui » à la question « avez-vous été victime de violence ? » suivi du type de violence (physique/verbale) et de la personne qui en est responsable (agent, usagers…), 341 situations de violences ont été remontées. 

  • 304 situations de violences verbales (faire quelque chose de visuel) 
  • 36 situations de violences physiques (faire quelque chose de visuel) 

202 situations de violences ou de menaces parmi les 341 ont été décrites dans la question ouverte. 

Les menaces et intimidations arrivent en tête avec 61 occurrences, cela inclut les menaces de mort, les menaces de représailles, les menaces physiques et les intimidations. 

58 réponses ont abordé les violences verbales et physiques de la part des usagers ou de leurs proches, souvent en lien avec les troubles psychiques des intéressés. 

42 répondants ont évoqué avoir été victimes de propos sexistes, racistes et diffamatoires. A noter par exemple qu’une répondante a été victime de propos sexistes de la part d’un élu siégeant en Conseil d’Administration. 

Parmi les autres situations : les remises en cause professionnelles (40 occurrences), le harcèlement moral et psychologique (36 occurrences) ou encore les tentatives d’ingérence de tiers dans l’établissement (12 occurrences). 

Si la violence verbale est le fait surtout des agents, la violence physique est plutôt engagée par les usagers

68% des D3S répondants ont été victimes de violences/menaces de la part d’un usager. La violence verbale de la part des usagers atteint des niveaux très élevés (57%) et le niveau de violence physique de leur part est également important (11%). Dans le secteur de la protection de l’enfance, 100% des enquêtés travaillant dans ce secteur ont répondu avoir été victimes de violence verbale de la part d’un usager.

Concernant la violence physique contre les D3S du fait des usagers, elle a lieu surtout en EHPAD. Cette violence physique s’explique souvent par des troubles psychiques, un épisode de décompensation ou une situation sociale aiguë (en particulier en protection de l’enfance). 

63% des D3S répondants ont fait l’objet de violences et/ou menaces de la part de collaborateurs/agents. La violence physique de leur part est plus rare (6%) mais la violence verbale atteint 57%. 

45% des répondants déclarent avoir été victimes de violences et/ou menaces de personnes extérieures à l’établissement. La violence verbale de la part d’une personne extérieure à l’établissement représente 41% des réponses. La violence physique de personnes extérieures s’élève à 4%. 

43% des D3S ont fait l’objet de violences et/ou menaces de la part d’un représentant d’usager. La violence verbale de la part des représentants des usagers est une réalité pour 40% des collègues, la violence physique de leur part est plus limitée (3%). 

Les contextes des situations de menaces et de violences sont souvent liés à des conflits entre un D3S et un agent ou un usager ou un de ses représentants (titre) 

Le constat partagé d’une absence de soutien de la part des autorités et des situations parfois judiciarisées (titre) 

Dans 40% des cas, ces violences/menaces ont été signalées à l’ARS et/ou Conseil Départemental. 30% des D3S n’ont pas obtenu de retour/réponse de la part de leur autorité de tarification

Pour 18% des répondants, les menaces et/ou violences ont donné lieu à une main courante ou à un dépôt de plainte. Dans 10% des cas, la plainte et/ou main courante a été suivie d’une enquête par les autorités judiciaires. 

Près de 44% des répondants estiment que le niveau de violence ou de menace s’est accru ces cinq dernières années (titre) 

La question ouverte a permis d’étayer les raisons supposées de cet accroissement des des situations de violence et de menace.

Concernant les agents, des répondants constatent une dégradation du rapport au travail chez leurs agents : des remarques des personnels qui témoignent d’un manque de respect de la hiérarchie, des niveaux de tension importants face aux injonctions, la méconnaissance et le non-respect des principes du service public ou encore des arrêts « réactionnels » en réponse à des décisions qui ne conviennent pas. 

Les représentants et les familles des usagers sont également pointés du doigt. Plusieurs répondants évoquent des familles particulièrement procédurières avec des niveaux d’exigences qui vont au-delà de ce qu’un établissement public peut leur apporter. Les modes de communication sont également ciblés : moindre courtoisie, comportements et discours moins « policés ».

Enfin, plusieurs enquêtés pointent l’ambiguïté des autorités de tarification : peu soutenantes, incompréhensions, méconnaissance du contexte national, notamment concernant les EHPAD, des contrôles et visites parfois tendues où l’échange ne se réalise par dans la bienveillance.  Plus globalement, les conditions financières dégradées des établissements sont ciblées. 

Les D3S sont forces de propositions pour améliorer leurs conditions d’exercice (titre) 

Pourquoi faire un visuel sur les propositions sous la forme d’une check-list ? 

La proposition qui revient la plus fréquemment (12 occurrences) est la mise en place d’un soutien psychologique auprès des Directeurs, de cellules d’échanges entre pairs ou encore d’un accompagnement professionnel renforcé. 

La nécessité d’être formé pour mieux prévenir les menaces et violences revient 8 fois. 5 répondants souhaiteraient également que les dispositifs de vidéo-surveillance soient davantage déployés dans les établissements pour personnes âgées. 

Sur le plan des pouvoirs conférés aux D3S, certains plaident pour des pouvoirs disciplinaires et de police élargis, avec notamment un « pouvoir de transfert » d’un usager vers un autre établissement si ce dernier met en danger l’institution. 

Un répondant met en avant les difficultés d’échanges avec les services de la Gendarmerie/Police, plus enclins à enregistrer les plaintes des familles que d’enregistrer les violences dont sont victimes les agents publics. 5 répondants plaident pour une collaboration renforcée établissements sociaux et médico-sociaux – Police – Justice. La procédure de dépôt de plainte pourrait aussi être simplifiée (5 occurrences). 

Enfin les répondants regrettent l’absence de soutien clair des autorités de tarification. L’ARS est pointée du doigt à plusieurs reprises comme ayant un discours « peu ou pas soutenant » (près de quatre occurrences). A ce titre, 3 réponses suggèrent de rendre les signalements et les plaintes plus transparents auprès de l’ARS et en assurer un suivi régulier de leur traitement (accusés de réception)