Le syndicat de tous les manageurs de santé
Actualités

Instance collégiale DH du 4 mai 2023 – déclaration liminaire du SMPS






Les différents chantiers de revalorisations du corps des Directeurs d’Hôpital ne peuvent pas rester au milieu du gué. La plupart des collègues ne pourraient l’accepter et prendraient cela pour une véritable trahison après les années de transformation de nos organisations, de réduction de nos moyens et crises à répétition.

L’âpreté du climat social lié à la contestation de la réforme des retraites donne à la tenue des instances dans la fonction publique comme la nôtre une tonalité particulière. 

Ce contexte prend tellement de place dans le champ médiatique qu’il amène une fois de plus à mettre de côté les défis sanitaires hors normes qui traversent le pays. Mais ce climat tendu, au-delà de l’objet de la contestation, est aussi une nouvelle fois l’illustration à tous les niveaux d’un questionnement sur la place laissée aux corps intermédiaires dans le pilotage des sujets sociétaux impactants comme du devenir des organisations de travail. Le dialogue social pour nos corps étant désormais réduit à ces rares moments d’expression, il apparaît encore une fois plus que nécessaire de nous en saisir tant l’actualité de nos métiers est dense.
 
En effet, un mois après l’entrée en vigueur des dispositions de la Loi Rist venant enfin encadrer les rémunérations des remplaçants et intérims médicaux, la situation au sein des établissements de santé semble plus tendue que jamais, à l’approche de l’été. Non pas tant parce que le supposé hit parade des services fermés ou des décès annoncés par un gang de vautours qui ne veut pas que le bien de l’hôpital public aurait eu raison, mais parce que le sujet de l’attractivité médicale est bien celui qui tous les jours, et depuis trop longtemps maintenant, repose sur la résilience des équipes et des directeurs, et peut conduire pour ces derniers à des mises en causes individuelles à tout moment.
 

Même si le « choc » a été évité grâce à la mobilisation des Directeurs, de l’ensemble des équipes et des ARS, et qu’il s’agit désormais d’aller jusqu’au bout d’une réforme nécessaire, la situation demeure extrêmement fragile à l’échelle nationale.
 
Et pour cause, la seule perspective à l’horizon pour les hospitaliers c’est un été qui s’annonce bouillant, dans une sorte de rediffusion de l’édition 2022 qu’on espérait ne plus revoir. Comme l’an passé, les Directeurs œuvrent bien en amont des recommandations des tutelles à préparer cette nouvelle saison en enfer.  Le SMPS espère que les annonces du Ministre de la santé et de la prévention hier au CNR Santé sur les objectifs de revalorisation des carrières des praticiens seront tenus et que les directeurs continueront d’être concertés sur ce qui est utile à cela.
 
Et si l’été 2023 donne déjà des signes avant-coureurs des difficultés à venir, celles-ci semblent bel et bien décuplées par rapport à l’année précédente que ce soit sur le maintien de lits ouverts, le « jonglage » permanent pour assurer la permanence des soins ou encore la capacité à maintenir les urgences ouverte en période nocturne. C’est donc une fois de plus les Directeurs qui vont devoir trouver, avec leur communauté médicales, les solutions de fortune pour limiter au maximum les effets délétères de cette nouvelle crise qui vient.
 
Si nos établissements parviennent encore à passer l’été qui arrive, ce sera une fois de plus au prix de la dévotion de celles et ceux qui en assure le fonctionnement à tous les niveaux. On ne peut en effet plus parler décemment de « bon fonctionnement » dans ces conditions où de trop nombreux collègues mettent en jeu leur responsabilité. Pourtant les Directeurs seront encore une fois à leur poste, prêts à tout faire pour éviter cette rupture des soins tant crainte et assurer un service public à la hauteur des attentes de la population. Car c’est bien la population qui pâtira en premier de cet état de fait qu’elle considérera, à juste titre, comme inacceptable.

 
Comment donc s’étonner dans un tel contexte que nos métiers n’attirent plus et que l’attractivité du corps des DH soit devenu la problématique principale de nos métiers ?
 
Alors que se sont closes au début du mois les inscriptions pour l’édition 2023 du concours de Directeur d’Hôpital, on ne peut que déplorer le peu d’avancées à ce jour sur l’ensemble des chantiers ouverts.
 
Les groupes de travail débutés le mois dernier avec la DGOS concernant la revalorisation de nos métiers ne donnent en effet pour le moment que peu de signes encourageants de mesures concrètes, rapides et de nature à redonner du sens pour les DH.
 
Sans forcément préjuger de la suite, et notamment d’un deuxième round de réunions déjà annoncés pour l’automne, on ne peut à ce jour que constater une méthode de travail qui oscille selon les sujets entre approximations sur les diagnostics et tâtonnements sur les propositions et qui dénote essentiellement par son manque de clarté tant sur les objectifs que sur les moyens mis en œuvre pour les atteindre.
 
La première rencontre concernant l’évolution des emplois fonctionnels a ainsi généré une certaine perplexité sur la compréhension des enjeux de la part du Ministère vis-à-vis d’un cadre réglementaire devenu totalement obsolète à l’heure des GHT et des directions communes.
 
Le fait d’envisager une refonte de ces emplois fonctionnels sans en augmenter le nombre  et sans en intégrer les impact sur la PFR ou le socle indiciaire alors que les besoins sont criants démontre ce décalage grandissant entre les acteurs de terrain que sont les DH et l’administration centrale.
 
Nous demeurons donc en attente d’éclaircissements sur cette question puisqu’à ce jour aucun scénario concernant cette refonte aux contours toujours flous n’est définitivement retenu.
 
Il en va par ailleurs de même pour le groupe de travail relatif aux rémunérations et à la carrière des Directeurs d’Hôpital dont la première partie s’est également tenue il y a quelques semaines. La DGOS n’en est là aussi restée qu’à l’étape des diagnostics sur notre corps et ses enjeux, notamment en termes de démographie et de mobilité inter fonction publique.

Quelle déception par rapport aux annonces volontaristes du Ministère de la transformation et de la fonction publique et du Ministère de la santé et de la prévention en janvier ! Que s’est –il passé  Recherche cohérence désespérément, et redoute atermoiements sur l’évolution statutaire des directeurs, indéfiniment !
 
Or, s’il est bien nécessaire de dresser un bilan complet de notre situation, nous restons en attente de propositions plus concrètes et escomptons bien en définir les bases au cours de notre prochaine réunion qui aura lieu le 12 mai.
 
Car les attentes de la part de tous les collègues sont grandes. Ils sont nombreux à nous questionner quasi quotidiennement sur ce que les DH sont en droit d’attendre légitimement de ces groupes de travail.
 
Il semble ainsi nécessaire de réaffirmer les engagements pris par le Ministère de la Fonction Publique en janvier dernier concernant les revalorisations des DH : l’arrimage de notre statut sur le nouveau statut des administrateurs de l’État tant pour l’évolution des grilles indiciaires que pour les conditions du déroule de carrière, c’est-à-dire notamment la suppression du quota d’accès à la hors classe que nous subissons depuis 2020. Pour le SMPS ces engagements constituent des objectifs clairs sur lesquels nous resterons fermes.
 
Mais nous attendons également de ces groupes de travail que soient enfin mis sur la table tous les autres points qui demeurent depuis trop longtemps en suspens, et notamment le déplafonnement de la PFR, la mise en place d’une politique de qualité de vie au travail ou encore l’élargissement des critères d’accès à la classe exceptionnelle. 

Ce qui doit donc découler de ces rencontres est un véritable aggiornamento de notre statut après la décennie de stagnation que nous venons de traverser et la dégradation historique de nos conditions d’exercice. 

Nous ne pouvons ainsi nous permettre de rester au milieu du gué. La plupart des collègues ne pourraient l’accepter et prendraient cela pour une véritable trahison après les années de transformation de nos organisations, de réduction de nos moyens et crises à répétition.
 
Un autre sujet qui retient l’attention des Directeurs dans cette actualité riche est bien entendu celui de l’avancée des travaux sur la création du fameux tandem « administratif-médical ». Les auditions de la mission Claris-Baille sont achevées depuis maintenant plus d’un mois et nous restons encore dans l’expectative quant à ses analyses et ses conclusions. Sans que nous n’ayons plus de visibilité sur l’objectif réel d’une telle réforme dont même les initiateurs peinent à en donner les tenants et aboutissants, Il apparaît que certains des scénarios proposés récoltent une opposition généralisée de tous les acteurs de la gouvernance tant ceux-ci sont déconnectés de la réalité de la coopération entre Directions et Corps médical. 
 
Au-delà de la remise en cause que ressentent de nombreux collègues vis-à-vis de cette nouvelle réforme de la gouvernance, celle-ci semble de plus en plus dénuée de sens, voire d’intérêt, hormis pour quelques agitateurs médiatiques pour qui « hôpital public » ne rime qu’avec « organisation bureaucratique ».
 
Nous ne pouvons donc que réaffirmer ici les constats déjà établis par le rapport Claris : la gouvernance n’est pas un des facteurs explicatifs des difficultés sans précédent que rencontre l’hôpital public. Celles-ci ne sont que le résultat de près de deux décennies de réduction systématique et continue de nos moyens dans une quête de performance qui ne fait aujourd’hui plus sens.

En un mot comme en cent : cette réforme de la gouvernance n’améliorera en rien le sort de l’hôpital public. Pire, elle sera un nouveau coup porté au peu d’attractivité qu’il nous reste.
 
Enfin, il semble opportun dans le cadre cette instance collégiale de revenir sur la question de l’évaluation des chefs d’établissement. Alors que l’ensemble des collègues demeure en attente d’un véritable accompagnement de la part des ARS dans leur évolution de carrière ou dans la conduite de leurs projets, on ne peut que constater la persistance de défaillantes profondes de la part des tutelles dans leurs missions et dans leurs pratiques.
 
Quelle suite est-elle donnée à ce souhait hautement légitime des directeurs ?
 
La rencontre fin mars entre le CNG, les organisations syndicales et des représentants des ARS pour aborder la rédaction d’une nouvelle instruction pour l’évaluation des Directeurs par leurs tutelles a ainsi permis de souligner certaines réalités qui peinent encore à émerger.
 
Nous avons œuvré à travers cette nouvelle version de l’instruction à ce que les attentes légitimes des collègues en matière de suivi et d’évaluation soient respectées.
 
Si l’accès à la chefferie n’est pas l’ambition de tous les Directeurs, elle demeure pour un certain nombre une étape cruciale qui doit être accompagnée par des tutelles soucieuses des professionnels à la tête des établissements. C’est une des nombreuses recommandations portées par le SMPS en la matière.
 

Ce retour sur notre actualité démontre donc une fois de plus à quel point de nombreux sujets relatifs à nos carrières, à nos métiers et à nos conditions d’exercice restent en attente de réponses.
 
Nous ne pouvons que saluer l’ensemble des travaux enfin débutés ces dernières semaines mais demeurerons vigilants à ce que ceux-ci soient suivi d’effets. Les Directeurs d’Hôpital ne peuvent plus attendre, au risque, sinon, que l’été qui vient soit le dernier pour lesquels ils consentent encore au sacrifice.