Condamnation d’un Directeur d’EHPAD :les D3S face à la judiciarisation de leur secteur
Le SMPS vous proposera désormais toutes les semaines une newsletter sur un sujet d’actualité relatif au secteur sanitaire, social et médico-social à destination de l’ensemble des manageurs.
Depuis plusieurs années, le SMPS ne cesse de dénoncer l’écart croissant entre les exigences, les normes, les protocoles toujours plus nombreux qui s’imposent à nos collègues directeurs et cadres et la raréfaction des moyens (mais aussi du temps) pour y répondre correctement.
Nouvelle aberration dont les médias et les fédérations se sont fait l’écho : la condamnation mi-mai à six mois de prison avec sursis d’un chef d’établissement en EHPAD pour le décès d’une résidente. Le 16 mai dernier, le Tribunal correctionnel a reconnu le représentant légal de l’établissement autonome coupable d’homicide involontaire « pour absence de consignes claires et défaut de formation du personnel ».
Le SMPS soutient sans réserve notre collègue D3S.
Cette condamnation démontre comment les D3S sont devenus les victimes collatérales de la faiblesse des moyens dans leurs établissements. Alors que le vieillissement de la population et l’arrivée de résidents avec des pathologies lourdes, notamment neuro-dégénératives, auraient dû conduire les pouvoirs publics à accorder davantage de moyens aux EHPAD, nous ne pouvons que constater l’effondrement de ce modèle et de ses ressources. Dans ce contexte et dans le cadre d’une mission sénatoriale, le Think thank « matières grises » a résumé en une phrase les maux rencontrés par nos collègues D3S : « le modèle économique a atteint ses limites en ce qu’il ne permet plus de financer les investissements nécessaires à la modernisation et à l’adaptation des capacités de prise en charge alors que les besoins vont significativement augmenter, sur le plan démographique comme sur le plan épidémiologique ».
Il faut ajouter à la situation financière dégradée des difficultés de recrutement manifestes. Ne nous leurrons pas : le secteur des personnes âgées n’attire plus, aussi noble soit la mission de l’accompagnement et de la prise en soin de nos aînés. La mission confiée à Myriam El Khomri (2019) sur l’attractivité des métiers du grand âge n’a pas porté les fruits et le nombre d’emplois vacants dans le secteur des EHPAD reste considérable.
Dans ce contexte, et pour assurer la continuité du service public hospitalier, les directeurs, les cadres de santé ou encore les infirmiers coordinateurs (IDEC) n’ont pas d’autre choix que de recruter des personnels parfois sous-qualifiés, osons le terme, pour accompagner les résidents en EHPAD.
Les chefs d’établissement D3S assument déjà de grandes responsabilités, souvent dans un contexte d’isolement qui affecte particulièrement leur exercice. Les D3S ne peuvent être tenus pour responsables des insuffisances des pouvoirs publics devant les tribunaux.
Le SMPS alerte sur ce phénomène de « judiciarisation » des EHPAD. Notre enquête portant sur les menaces et les violences à l’égard des D3S, que vous trouverez dans le lien ci-après https://fr.surveymonkey.com/r/BRCRPKZ, aborde d’ailleurs ce point et une synthèse des résultats vous sera proposé lors de notre congrès du 19 septembre prochain.
Nous n’acceptons pas que les Directeurs deviennent les « fusibles » des carences de l’Etat dans l’attribution des moyens dont leurs EHPAD manquent cruellement. Le SMPS prendra systématiquement position pour des mesures proportionnées aux manquements commis dans des situations bien délimitées.