Le syndicat de tous les manageurs de santé
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CAPN D3S du 24 mars 2022:

Manque de moyens, loi déstabilisante et promesses de contrôles renforcés: rien n’est décidément fait pour le bien du corps

Déclaration liminaire du SMPS

 

24 mars 2022

« Madame la Présidente,
Madame la Directrice,
Mesdames et Messieurs les membres de la CAPN,

Nous voici arrivés à la dernière CAPN de cette législature. CAPN qui a été très fortement vidée de son sens, suite à la Loi de simplification administrative, puisqu’aujourd’hui, nous étudions 2 renouvellements de recherche d’affectation, une dans chaque classe. Heureusement que cette CAPN se tient par visio-conférence !

Les rapports, les missions flash, les émissions se sont succédées, mais pourtant, rien ne s’est produit pour nos établissementsOu plutôt si : les grands chantiers de l’autonomie et du grand âge ont été aussi longuement annoncés que vite enterrés. Pour ces personnes vulnérables, rien ne vient améliorer la prise en charge. Je mettrais néanmoins un bémol à ce constat négatif, il y a eu une avancée sur la cinquième branche, mais sans véritable garantie de la pérennité des financements. Les directeurs, les personnels, les personnes fragiles accueillies et leurs familles espéraient beaucoup et sont aujourd’hui bien déçus. Il est vrai que les promesses ne concernent que ceux qui y croient…

Il est une Loi scélérate qui est aussi passée, en fin d’année 2021 : La loi 3DS a mis fin aux compétences de notre corps pour les établissements relevant du secteur de l’enfance. Cette réforme vient conclure un quinquennat qui a donné le ton pour les D3S, pour les institutions qu’ils dirigent mais surtout pour les personnes qu’ils accompagnent. En effet, nos collègues D3S ne pourront plus diriger les établissements accueillant des enfants et des adolescents, sauf à y être détachés dans la fonction publique territoriale. Ils pourront au mieux être adjoints alors que leur formation et leur spécialité étaient un avantage pour ces jeunes en difficulté. Qu’en sera-t-il demain pour tous ces établissements ? Et quelles solutions seront apportées à nos collègues en place ? Le corps était déjà peu attractif, cette Loi l’affaiblit encore…

Le livre « les Fossoyeurs » de Victor Castanet jette un grand doute, mais aussi l’opprobre, sur les établissements. Car l’amalgame est rapidement fait et tous les établissements, quoi qu’ils fassent, se retrouvent dans la tourmente médiatique à laquelle s’est ajoutée, la semaine dernière, une vidéo virale de violences faites à une personne âgée, filmée par une caméra dissimulée dans la chambre. Bien sûr nous condamnons ces actes de maltraitance, mais force est de constater que cette maltraitance est la résultante du manque de moyens humains et financiers que connaissent les EHPAD, mais aussi les autres établissements. A cela nous attendions une autre réponse que celle visant à inspecter tous les établissements en 2 ans, mais aussi à revoir les évaluations des établissements avec de nouveaux indicateurs. Pensez-vous que c’est ce qu’attendaient les directeurs, leur personnel et les usagers ? Ces contrôles annoncés, même s’ils peuvent être des leviers de management inquiètent nos collègues. En effet, ceux qui contrôleront sont ceux qui financent et ne donnent pas les moyens nécessaires, donc ceux qui organisent la pénurie, et incidemment la maltraitance.

Le dernier rapport de la Cour des Comptes du 28 février 2022, ainsi que les missions flash parlementaires de début mars, s’ajoutent aux très nombreux rapports et missions qui ont émaillés les 15 ou 20 dernières années et qui aboutissent tous au même constat : nos établissements manquent de moyens financiers et de moyens humains. La France continue à creuser son retard avec les autres pays européens. Nous sommes toujours loin du compte, puisqu’actuellement, le ratio moyen en EHPAD est de 63 ETP pour 100 résidents, tous métiers confondus. Pourtant certains Conseils départementaux et ARS demandent aux établissements qui dépassent ce ratio de revenir dans la moyenne départementale, qui est très proche de la moyenne nationale. ET on dira que ce sont les directeurs qui faillissent !

Beaucoup d’établissement souffrent de la suite de la crise sanitaire : épuisement des personnels, démissions de certains soignants, épuisement des finances. Les surcoûts n’ont pas été pris en compte à la hauteur des dépenses et même certaines périodes ont été « oubliées » par nos gouvernants. Par ailleurs, les décisions sur le CTI et sur les évolutions de certaines grilles ne font l’objet actuellement ni d’une prise en charge suffisante, ni d’un financement pérenne, ce qui inquiète au plus haut point nos collègues, qui avec les nouveaux textes craignent de se retrouver personnellement responsables des déficits engendrés. Ce n’est pas acceptable.

Il est temps, pour nos établissements, et notamment les EHPAD, de revoir le mode de financement, de le simplifier, de réduire le reste à charge pour les familles et enfin d’obtenir les moyens humains en suffisance, accompagnés des financements à la hauteur de ces besoins.
Arrêtons les effets d’annonce qui ne sont pas accompagnés des budgets adéquats.
Aboutissons à ce que les CPOM soit de véritables CPOM et non pas juste des Contrats Pluriannuel d’Objectifs.
Faisons également en sorte que ces populations fragiles soient mieux prises en charge.

Mais pour cela, il faudra pouvoir recruter en nombre sur des professions qui aujourd’hui n’emballent pas les foules. Pour attirer les soignants, mais aussi les autres personnels, il faudra, d’un côté, augmenter sensiblement les rémunérations, dégeler fortement le point d’indice, et de l’autre octroyer les moyens financiers nécessaires et suffisants.

Le Premier Ministre a présenté récemment un nouveau plan pour notre secteur, mais avec celui-ci, les responsabilités, les normes, les injonctions, les reportings et autres contrôles vont s’alourdir pour les D3S, mais toujours sans reconnaissance, ni revalorisation financière. Et ce n’est certainement pas la fusion des corps qui pourra apporter une réponse à tous ces problèmes et à l’isolement des D3S.

Il est désormais habituel de ne rien faire pour les D3S.

Il est devenu normal et même communément admis pour les pouvoirs publics que les chefs d’établissements de structures sociales et médico-sociales, malgré des responsabilités équivalentes à leurs homologues des établissements publics de santé, voient leur progression de carrière différenciée à leur détriment.

Il est normal qu’un chef d’établissement D3S en sortie d’école se voit attribuer une rémunération moindre qu’un adjoint DH.

Dont acte.

Il est intéressant de constater que la démographie montre une plus grande présence en proportion des femmes chez les D3S par rapport à leurs collègues DH. Alors que les politiques publiques se targuent de progressisme et d’égalité femme-homme, il convient de s’interroger sur le refus d’alignement des rémunérations. Le corps, alibi d’une ségrégation ?

Nous avons demandé de manière continue depuis une décade l’alignement des rémunérations qui nous paraît la solution la plus juste pour préserver notre identité et pour reconnaître notre travail. Ce dossier, comme les autres, n’a jamais été pressant. La reconnaissance financière attendra comme elle a été retardée pour le Ségur et comme elle ne le sera pas pour les professionnels de l’enfance.

Quel rôle pour le CNG en 2022 ? Accompagner un plan social qui tait son nom pour reconvertir des professionnels expérimentés et impliqués auprès de leurs équipes. On a pu voir les campagnes de communication pour vanter les métiers. Attractivité factice ? Communiquer certes. Encore faut-il une cohérence entre les paroles et les actes. Sur ce point comme sur les autres, la parésie ne fut pas au rendez-vous. »